La Chambre de Réflexion

La Chambre de Réflexion est un projet réalisé dans le cadre du cours d’installations hybrides, donné pendant le semestre hiver 2015 à l’Université du Québec à Chicoutimi. Le thème de ce projet était « chimère ».

Le son est un élément fondamental dans ma pratique artistique. L’impact que peut avoir le son sur le conscient et l’inconscient, la manière dont il peut influencer notre perception de la matière, du temps et de l’espace sont des phénomènes qui exercent sur moi une grande fascination. La recherche et l’expérimentation sonore ont donc un rôle central dans mon travail, qu’il soit de nature performative ou installative.

Étant également animé par une volonté écologique, je tenais à faire un projet en utilisant, autant que possible, des matériaux récupérés. J’ai donc décidé d’utiliser un haut-parleur Leslie déniché dans un vieil orgue électronique brisé. Ce dispositif me permet d’explorer à la fois et à peu de frais, les dimensions sonores et visuelles.

Mais qu’est-ce qu’un haut-parleur Leslie? Inventée au début des années 1940 par Donald Leslie, la cabine Leslie est un dispositif comportant des haut-parleurs orientés vers des diffuseurs rotatifs qui sont entraînés par des moteurs. La cabine Leslie permet une diffusion spatiale du son tout à fait unique. Plusieurs effets sonores sont créés grâce au mouvement rotation des diffuseurs : un effet de trémolo (le son s’approche et s’éloigne), un effet de panoramique (le son se déplace de droite à gauche) ainsi qu’un effet de vibrato (causé par l’effet Doppler). La spatialisation sonore engendrée par le cabinet Leslie est unique et ne peut être imitée par un système stéréo conventionnel. Pour de plus amples informations sur la cabine Leslie et l’effet Doppler :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Cabine_Leslie
http://fr.wikipedia.org/wiki/Effet_Doppler

Mais pourquoi donner le titre de « chambre » à une installation qui ne consiste qu’en un dispositif sonore inventé il y a plus de 70 ans? Considérant qu’une installation s’inscrit nécessairement dans un milieu; considérant l’impact que peut avoir un dispositif sur son milieu; considérant l’importance qu’a ce milieu sur notre perception d’une œuvre; alors oui, l’œuvre s’étend bien au-delà du dispositif. Dans le cas de la Chambre de Réflexion, l’installation ne se réduit pas simplement à son dispositif : la pièce entière fait partie intégrante de l’installation, de même que son contenu. L’air, les murs, le plafond, le plancher ainsi que les spectateurs ont tous un impact acoustique, jouent tous un rôle sur la perception de l’œuvre et en font intrinsèquement partie.

Ce principe ne s’applique pas que pour le son. La lumière joue également un rôle prépondérant dans la Chambre de Réflexion. Les miroirs qui sont fixés autours du diffuseur Leslie créent un jeu de lumière interactif. La lumière ambiante, de même que l’image des spectateurs sont reflétées et diffusées de multiples fois et de manière complexe, créant un spectacle lumineux mouvementé et éblouissant à travers la pièce. L’installation résulte en une expérience son-lumière complète et unique. Le même dispositif, installé dans un autre endroit et/ou devant d’autres spectateurs, offrira une expérience assurément différente à chaque fois.

Le son qui est diffusé dans la pièce tire sa source d’un petit synthétiseur analogique dissimulé dans le cabinet. Sa sortie est amplifiée avant d’être envoyée au haut-parleur . Les sons sont produits en temps réel par l’appareil, ce qui rajoute à l’unicité de l’expérience. De plus, les sons synthétiques donnent un aspect surnaturel au dispositif et vont de paire avec la dimension visuelle. Un capteur infrarouge détecte la présence de spectateurs et déclenche à la fois l’émission du son et la rotation du diffuseur, rendant le dispositif interactif, simulant un sentiment de panique, lui insufflant presque la vie et évoquant les chimères et autres créatures mythiques.